Canal Sport Spécial,
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Reportage en live !
La saison sportive ?
Le Challenge Vatican
Fête le Calvaire !
Fiston à vélo
Va gravir le Golgotha :
La pente est facile !
Les chrétiens verront
(Et le spectacle est gratis !)
Sa Passion fatale.
Ponce a fait voter :
Il relâche le gangster
Et va se laver…
Ce sera la fête,
Il va gagner ce trophée :
Les anges sont prêts…
Les coachs vigilants
Galvanisent les sprinters :
Ils viennent en force !
Les athlètes piaffent,
Ils visent le gilet ocre
Avec arrogance.
Le starter les lance !
La tension s’accroît en flèche !
Ça part en voltige…
Les gens crient « Iahvé ! »,
La folie les enveloppe,
Les vivats résonnent.
Shooté à l’EPO
Il évite les graviers,
Ses hanches frétillent…
Le peloton file
Vers les gratifications.
On va parier cher.
On voit les fortiches :
Rien à voir avec la piste,
Ni les pavés gras…
Le sport c’est ingrat,
Et l’enfer c’est les pavés :
Le Christ les évite.
Virage en épingle,
Il est flashé à cent vingt :
Le chrono éclate !
Il franchit le col,
Les graviers pètent sa chaîne,
Les larrons vont vite…
Vers les oliviers,
Fiston vise la colline
Et change son cap.
Le virage est traître,
Saint Esprit cherche à freiner.
La gloire s’éloigne.
Son engin cahote
Prostré, la cheville enflée,
Ses copains l’escortent.
Le final est loin :
C’est vers les Trois Piloris !
Ça gâche l’espoir…
Crevé par l’épine !
Il va falloir regonfler.
La valve est HS…
Il crache Ses tripes
La Cène L’avait gavé :
Trois cents falafels !
On le ravitaille,
Ses fans agrippent sa selle,
Chipent son flacon !
Ses poignets transpirent.
Le Père en chef l’a trahi…
Et voilà ! Il flanche !
Atteignant l’église,
Fiston choppe le trottoir !
Sa veine s’achève !
Il Se signe en vain…
Sa vanité fait pitié :
C’est pas très catho !
Et Son pignon casse !
Il va frôler le fossé…
L’engrenage échappe…
Il glisse et s’étale,
Son vélo ripe et s’affaisse,
On le voit chialer !
Finish haletant !
Il transpire, à l’agonie…
Il saigne ! Est-ce grave ?
Il s’écrase, en fièvre.
Véro, notre reporter,
L’a photographié !
Il glapit : « Élie ! » …
Ses rêves se carapatent !
Il fait Son théâtre !
Ses artères giclent !
On L’attache à la civière,
Les flancs pantelants.
On Le soigne en hâte,
Le frotte avec le vinaigre…
Papa craint le pire…
C’est la fin, hélas.
Il n’a pas passé la ligne,
La côte crevée.
La ligne est franchie,
Les gagnants ovationnés.
Le Fiston trépasse…
Pilate l’achève.
Saint Larron finit placé,
Gracié par Son Père.
L’Ascension approche.
Papa épargne son Fils,
Évitant la honte…
Les Fils à Papa
Ont le penchant vers la triche,
Et gagnent sans cesse.
Papa est content :
Fiston gagne l’épitaphe
Gravée or : « INRI » !
Après cet échec,
Prochaine étape : la plage !
Il est favori.
Cette magnifique réécriture de « La Passion considérée comme course de côte » d’Alfred Jarry m’a été offerte par Bernard Maréchal en variante du Pataméride, projet d’un an de haïkus quotidiens en beau présent à partir du Calendrier Pataphysique. Cette variante correspond au « 19 mars – 25 Pédale – S. Poligraf Poligrafovitch, chien ».